Le portage salarial en question

25 juillet 2016 07:26

Ce ne sont pas les membres de Jemepropose qui diront le contraire : oui, le salariat classique (CDI temps plein) n’est pas l’unique voie pour créer des emplois pérennes. Depuis dix ans, 200.000 Français ont d’ailleurs choisi le portage salarial pour mener à bien leur carrière professionnelle. Le principe permet à un indépendant de créer son activité et de la gérer comme un entrepreneur, tout en bénéficiant du statut de salarié. La Loi Travail, qui vient d’être adoptée à l’Assemblée nationale, donne un nouveau cadre au portage salarial. Cependant, la ratification de l’ordonnance ne fait pas l’unanimité. Après moult discussions sur fond de contestation sociale, la Loi Travail a été adoptée le 21 juillet 2016, à l’Assemblée nationale – non sans un troisième recours à l’article 49-3 de la Constitution par le Premier ministre Manuel Valls. Cependant, le texte, défendu bec et ongles par la ministre de l’Emploi Myriam El Khomri, compte encore de nombreux points de désaccords. Notamment sur la question du portage salarial qui consiste, on le rappelle, à permettre à des travailleurs indépendants de facturer leurs services tout en bénéficiant d'un statut de salarié. Et il n’a pas fallu 24 heures pour que pro et anti dégainent communiqués de presse et tribunes s’enthousiasmant ou fustigeant – c’est selon – l’action gouvernementale. Au lendemain de la ratification du portage salarial, le PEPS, premier syndicat du portage salarial, s’est « félicité » de cette « grande avancée sociale et réglementaire ». « Ce dispositif juridique renforce l’encadrement et valorise nos pratiques, en permettant, sur le long terme, à des centaines de milliers de professionnels autonomes et de demandeurs d’emploi d’accéder au marché du travail », commente Hubert Camus, président du PEPS. Pour Patrick Levy-Waitz, président d’ITG, leader du secteur et également président de l’Observatoire Paritaire du Portage Salarial (OPPS), « l’encadrement tel qu’il est établi dans l’ordonnance, et donc le décret, fixe une réalité : ne peuvent utiliser le portage salarial que ceux qui ont la capacité d’être autonome. Elle consacre donc la conception de base du portage salarial : il est né pour permettre à des personnes qui ont la capacité d’autonomie d’exercer une activité de façon autonome et sécurisée. La profession doit désormais démontrer que l’accompagnement des personnes en portage et la qualité du service qui leur est proposé leur apporte une réelle plus-value et correspond pleinement à l’ère du temps. Le temps de la bataille pour l’existence s’achève, le temps de l’innovation et du développement commence. » La FEPS, la Fédération des entreprises de portage salarial, reste quant à elle sur sa faim. « En avril 2015, nous avions accueilli avec soulagement l’ordonnance qui offrait enfin un cadre au portage salarial », explique l’organisme dans une déclaration envoyée à la presse. « Le texte n’était pas parfait, mais il avait au moins le mérite d’exister, de reconnaître l’utilité sociale et économique de notre activité, et de sécuriser les salariés portés. Nous avons eu vite fait de déchanter devant la liste interminable de limitations imposées et des sanctions pénales attachées. » Et de conclure : « Le gouvernement est resté sourd à nos appels […] pour ouvrir le portage salarial aux non cadres et à toutes les professions exercées par les autoentrepreneurs ou même pour permettre aux particuliers de faire appel aux services d’un salarié porté. » Le décret serait-il trop restrictif ? C’est ce que laissait déjà entendre en février 2016 Josette Londé, présidente de l’Uneps, Union nationale des entreprises de portage spécialisées. « Selon la définition officielle, le salarié porté peut être toute personne justifiant d’un niveau d’expertise, de qualification et d’autonomie suffisant pour rechercher ses clients », rappelle-t-elle. Or, « en plus d’être expert, il faut aussi savoir se vendre et faire un chiffre d’affaires (CA) suffisant pour avoir droit au salaire minimum prévu par l’ordonnance d’avril 2015, c’est-à-dire 2.380 euros mensuels, versé par l’entreprise de portage salarial ». Ce qui signifie que le salarié porté doit réaliser un CA de 4.800 euros HT par mois ! De fait, « ces dispositions éloignent du portage une partie importante des indépendants », regrette Josette Londé.    

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